Chroniques régulières sur des livres, présentations de nouveaux auteurs

💜💜💜💜 ELLES de Lisa Lutz

RESUME

JC LATTES
le Masque
21/03/2018
Tanya Dubois, trentenaire, se retrouve face à son mari Franck mort d’un malaise et sa réaction est de fuir son foyer. Pourtant, elle avoue ne pas l’avoir tué. Cependant, elle s’empresse de se procurer une nouvelle identité d’Amélia Keen, en espérant passer inaperçue et de fondre dans la masse. C’était sans compter les rencontres au gré des bars fréquentées le long de son trajet, dont celle avec Blue dont la fréquentation et l’impulsivité vont bouleverser ses projets. Contrainte par les évènements à échanger son identité avec Blue, Amélia Keen deviendra Debra Maze et changera alors au fil des femmes qui lui correspondent physiquement…
Quand et comment cessera cette fuite et pourquoi cette redoutable crainte d’être soi-même ?

MON AVIS

Je remercie Netgalley.fr et les éditions J.C. LATTES de m’avoir permis avec ce SP de suivre cette fuite incessante et palpitante d’une femme à travers les Etats Unis. Je serais tentée d’intituler ce thriller de 300 pages  « En quête d’identités ».

Road trip aux USA

Ce road-trip démarre du Winconsin pour l’Oklahoma et le Wyoming puis la Virginie pour se poursuivre dans l’Ohio jusqu’à sa destination finale…. Pour être au plus près de cette aventure, on pourrait suivre le trajet de la narratrice sur une carte routière ; l’héroïne nous gratifie d’ailleurs de détails autoroutiers dont elle se targue de bien maîtriser.

USURPATION D’IDENTITES

Les multitudes d’identités utilisées par  le personnage principal a un peu déstabilisé la lectrice que je suis, lectrice étourdie qui surfe sur les noms des personnages sans les retenir au premier jet. D’où une précaution particulière à prendre avec cette narratrice qui change d’identité tout au long du parcours.
On ne comprend pas tout de suite cette pratique d’usurpation d’identité. Ses scrupules et sa conscience généreuse des conséquences pour ses victimes la rendent pathétique. Rapidement, le lecteur la voit acculée et contrainte de pratiquer cette infraction et relègue au second plan la raison inexpliquée de sa conduite lors de la mort de Franck Dubois son mari. Sa quête pérenne d’identité d’autrui et de solitude obstinée prendront tout leur sens à l’extrême fin du livre. Mais il faudra patienter sur près de 270 pages pour comprendre. 

Une intrigue entretenue

L’échange de mails entre Jo et Ryan retranscris parfois en fin de chapitres renseignent peu le lecteur malgré cette source d’indices mais n’éclairent pas vraiment ; la fin du roman leur donnera tous leur sens.

Ses métamorphoses physiques accompagnent la construction des personnages qu’elle endosse avec plus ou moins de succès donne de la cohérence à l’ensemble du roman. Et pour agrémenter la lecture, l’humour jalonnera la narration des déconvenues subies.

Donc, belle prouesse de l’auteur de bien entretenir l’intrigue avec l’intelligence (pour trouver la bonne identité), la débrouillardise (pour dégoter le bon véhicule et l’hébergement plus ou moins adéquat) et la bienveillance de l’héroïne (pour épargner ses victimes) qui nous tiennent en haleine et la rendent attachante.  

Les rencontres avec les différents personnages présentent l’intérêt de leur variété et des rebondissements qu’ils apportent à l’intrigue. Jusqu’à la fin, plane sur le récit l’ambiguïté de la sincérité de Blue :

Avec Blue, la vie semblait tellement facile. On aurait dit un jeu de cache-cache sans fin. Elle continuait à vaquer à ses occupations sans s’inquiéter un instant de savoir si son passé allait la rattraper. Je ne doute pas que Jack était un salaud et qu’il a peut-être eu ce qu’il méritait. J’ai connu ma part de salauds dans la vie. Il m’arrive de penser que j’en tuerais volontiers un ou deux ; mais si je le faisais, j’en serais affectée après. Ce ne serait pas un geste anodin. Je ne dis pas que je ne saisirais pas l’occasion si elle se présentait, mais après ça, je ne fredonnerais pas sous ma douche avec l’insouciance de Blue, qui chantait en boucle le jingle qu’elle venait d’entendre à la télévision.
Je recommande vivement ce roman si vous souhaitez vous évader le temps de quelques heures.

BONNE LECTURE !

Pour vous le procurer, voici ce lien

 

Quelques citations qui donnent le ton :

Blue était en train de chasser de ma tête toutes les voix me disant qu’il y avait autant de trous dans son plan que dans du gruyère.
Si vous êtes en train de courir, votre vue est brouillée. Vos nerfs bourdonnent au point de couvrir les bruits du monde extérieur. Mais les gens croient ce qu’ils ont envie de croire.
Si un jour on tue quelqu’un une fois, même avec une petite excuse d’autodéfense, on peut blâmer le hasard, se dire qu’on était au mauvais endroit au mauvais moment avec la mauvaise identité. Mais la seconde fois, on commence à se poser les questions qui fâchent.
– Vous êtes riche ? ai-je demandé.
– Pardon ? a dit Jack, visiblement désarçonné par la question.
– Vous n’êtes pas en train de songer à m’extorquer du fric ?
– Oh là non ! ai-je dit, toujours hors d’haleine. J’essaie juste de comprendre pourquoi Blue vous a épousé. Parce que vous n’avez pas une seule des qualités qu’on attend chez un mari.
  Mon nom de jeune fille, c’était Debra Maze. Quand je me suis mariée, je suis devenue Debra Reed. Pendant quelques années, j’ai été instit jusqu’au jour où je n’ai plus été présentable devant des enfants. Alors il a fallu que je m’enfuie et ma cousine, qui a l’air d’être ma sœur, m’a donné son vieux permis de conduire. Pour l’instant, je suis Carla Wright et, tant que je ne demande pas de crédit ou quoi que ce soit d’officiel, je peux sans doute conserver ce nom encore un moment. Mais mon passé finira par me rattraper un jour. Comme toi le tien.
Et vous, que pensez- vous de la chronique ? N’hésitez pas à laisser un commentaire…