Chroniques régulières sur des livres, présentations de nouveaux auteurs

💜💜💜 L’ORCHESTRE DU TITANIC d’A Perissinotto

Le cadre idyllique d’un club de vacances s’avère devenir une scène dramatique de vacances complexes, gâchées par un crime.

Quatrième de couverture

odile Jacob
L’histoire dit que, lors du naufrage du Titanic, l’orchestre, imperturbable, continue de jouer sa partition jusqu’à la fin. C’est cet étrange sentiment qu’éprouve la psychologue Anna Pavesi, détective malgré elle, lorsqu’elle  débarque au village Calypso : alors qu’a été découvert le corps sans vie d’un animateur, la routine du club de vacances tunisiens continue comme si de rien n’était. Pour la police locale, cela ne fait aucun doute : il s’agit d’une aventure amoureuse qui aurait mal tourné. C’est légion, les liaisons d’un soir dans les clubs de vacances. Et certaines laissent même des traces tangibles, surtout à l’heure du Web.
Anna, elle, n’est pas convaincue. Il faut dire qu’elle a un certain talent pour dénicher la vérité. Peut-être parce qu’elle sait la chercher : dans la tête des gens.

L’auteur Alexandre Perissinotto

est professeur de sémiologie à l’université de Turin. Il est notamment l’auteur de déjà plusieurs romans : « l’année protecteur a été tué », « à mon juge », « dernière nuit blanche » et « une petite histoire sordide ».

RESUME

Anna, psychologue à Bergame, travaille pour la police, elle est chargée d’interroger les délinquants lors des enquêtes criminelles. Un jour, elle croise Madame Melzi qui lui demande de l’aide pour sa fille Aurora, bipolaire. Pendant ses vacances en Tunisie avec son petit ami Ermanno, la jeune fille aurait fait une « bêtise » :
Une bêtise. « Bêtise », « espièglerie », « vaurien », au pire « sagouin », les termes vieillis, désirait, désuets, de quelqu’un qui, dans sa vie, n’avait jamais pensé devoir un jour aborder un sujet réclamant des appellations plus adéquates, plus fortes, plus vulgaires.
En l’occurrence cette fois-ci, Aurora aurait assassiné l’animateur du club de vacances Johnny, et aurait tenté de se suicider dans la foulée. Hospitalisée, elle attend un avocat pour un futur procès car, vu les circonstances, la police la pense coupable. Elle risque un emprisonnement à vie.
La conscience professionnelle et un voyage « all inclusive » incitent Anna à se rendre en Tunisie pour comprendre le comportement d’Aurora. Le salut de sa défense serait de la déclarer « irresponsable » en application de la Jurisprudence Italienne de la cour de Cassation avec la décision de 2005.
Comble de chance, Marco, accompagne Anna. Alors Elysabetha la directive du club calypso, laconique, se montre embarrassée par l’affaire. Avec l’assistance de Marco, Anna interroge la police puis Aurora à l’hôpital. Puis, ils  enquêtent sur son fiancé, les témoins potentiels et à qui veut bien répondre. Le temps presse.
Mais quand Marco repart pour son travail en Italie, la tâche se corse pour Anna dans cette société machiste. Et pourtant, même seule, cette femme persévère malgré le danger. Hors de la sécurité confortable des confins du village, elle cherche à comprendre le crime. En effet, Aurora risque la prison si on ne peut prouver son irresponsabilité…

MON AVIS : Des vacances complexes dans un cadre magique

Cadre magique

Le parallèle au Titanic est subtil.  Ces vacances  d’Aurora et Ermanno se promettaient inoubliables, paradisiaques. L’exotisme d’un voyage vers le lointain cerné d’un paysage marin baigne normalement les protagonistes dans un romantisme incontestable. Et dans le village de calypso, les évènements deviennent brutalement tragiques. En comparaison du Titanic scellé dans un destin dramatique comme celui d’Aurora, la narratrice Anna persévère malgré tout dans sa quête, comme l’orchestre qui continuait de jouer, sans se laisser submerger par la fatalité.

Le roman illustre l’ambiance de villages de vacances, des clubs de vacances. Le cadre et l’organisation chronométrée des activités satisfont les envies de chacun. On est prêt à réserver immédiatement sa place. L’abondance indécente offerte aux touristes n’est pas écartée : la nourriture proposée à outrance, le personnel soumis et corvéable, des activités à foison pour l’once d’un ennui potentiel. L’artifice et l’amusement y sont la règle et chacun s’y complait.

Des vacances complexes

La narratrice Anna, conquiert immédiatement le lecteur avec son naturel, consciente de ses propres imperfections. Son âge, ses kilos en trop, son divorce, sa relation avec un homme marié, la rendent sympathique, abordable et attachant. Avec son courage intelligent, elle séduit aussi. Son couple avec Marco tout juste divorcé et accaparé par son travail, reste très réaliste. Alors, de ce fait, on la sent être indépendante et maître de ses décisions.

L’enquête n’est jamais délaissée pour les vacances un peu forcées d’Anna et Marco. Les risques pris par Anna presque inconsidérés pourraient annihiler la crédibilité du récit. Cependant, la narration est très cohérente et sa prudence reste de mise.

Elle échafaude toutes les suppositions du début jusqu’à la fin, de la culpabilité d’Aurora à son passé et le rôle de sa bipolarité.

Pour les férus de données juridiques, référez-vous à la page 43 pour la Jurisprudence Italienne : elle conforte la véracité des analyses d’Anna, enquêtrice improvisée.

 En Tunisie

Un éventail des vacanciers se gavent de toutes les animations sportives et ludiques proposées par les Club. Et le dévouement servile du personnel infaillible est le pilier de cette économie du loisir bienfaitrice pour le pays. D’ailleurs, Omar, Karima, et le photographe en sont des exemples.

L’animateur Jonathan Caputo, dit « Johnny » est le prototype du beau gosse séduisant et séducteur. Voici la version contemporaine et dramatique du personnage de Popeye du film culte « les bronzés ». Toutes les suppositions s’offrent à Anna sur ce bellâtre objet d’animosité des maris trompés :

sauf que malheureusement pour Aurora, c’était elle qui avait accompli ce que les autres avec seulement désiré : sa folie passagère lui avait donné le courage qui leur a manqué,

mais il est aussi Américain :

si la catégorie la plus juste « américain » ?… Quelqu’un qui habitait À deux pas de la Libye avec un secret à me révéler à propos de cet américain. »

Bilan

Donc, ces 260 pages sont agréables à lire

En partant des troubles bipolaires, on pourrait en déduire une dangerosité potentielle. Alors, pour donner une justesse au récit, le lecteur devra porter une attention particulière sur les analyses de la psychologue. L’enquête menée par Anna nous invite aussi à s’inquiéter sur les conséquences dramatiques qui peuvent survenir lors de voyages, que l’on soit coupable ou innocent dans des pays étrangers… car, toutes les justices ne se valent pas.

Bonne lecture !
Vous pouvez vous procurer le livre ici.
Quelques phrases sympathiques :
Connais-tu quelqu’un qui, en phase maniaque, aurait hypothéqué sa maison de famille pour acheter une Ferrari ? D’ordinaire  avec des bipolaires lourds, les parents parviennent à bloquer par différents moyens les possibilités d’achat.
… des pensées positives, digne d’un manuel d’estime de soi, des réflexions grenouilles voulant se faire aussi grosse que les bœufs. Les faits divers étaient pleins de grenouilles qui qui finissaient dans la tout en se croyant devenues des bœufs.
 « Tu as été ma femme comme un instant de ta vie et, lorsqu’elle est revenue, elle n’était plus la femme de personne. » Léonard Cohen
Et vous, que pensez- vous de la chronique ?  N’hésitez pas à laisser un commentaire…

AnneC

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