QUATRIÈME DE COUVERTURE
« Maître des passions, maître des haines, maître des larmes et des tourments », selon Magma, l’amour n’est vraiment pas toujours le sentiment de paix et de douceur auquel on aspire. Chacun se sait capable d’accomplir des miracles pour les beaux yeux de l’être aimé… Mais quand l’amour sans limites se complique de jalousie, de colère, d’envie et de violence, le cocktail peut être dangereux et conduire au meurtre.
Supprimer l’ancien conjoint que l’on ne supporte plus, les parents s’opposant à un mariage, l’enfant naturel faisant obstacle, ou bien n’importe qui – pourvu que cela rapporte de l’argent -, tels furent les faits d’armes de ces « amants diaboliques », chers à Boileau-Narcejac. De l’affaire de la Vénus de Gordes à celle des diaboliques de Bourganeuf, ils sont, en ces pages, une trentaine de couples à avoir eu droit, chacun à leur époque, aux honneurs des journaux, du milieu du xixe siècle à nos jours. Citons ici les noms d’Elisabeth Ducourneau, Jacques Algarron, Simone Deschamps, Bernard Cousty et Valérie Subra… Pas de happy end en ces histoires : pour leurs noces, les diaboliques s’unissent uniquement pour le pire, et toujours jusqu’à ce que la mort les sépare…
MON AVIS
Remerciements au site Babelio pour l’envoi gracieux du livre en vue d’une chronique dans le cadre de l’opération Masse Critique.
Cette rétrospective des chroniques judiciaires autour de crimes scabreux s’étale du XIXè siècle jusqu’à une période plus contemporaine(1862-1984). La mention « crimes passionnels » du titre fait allusion aux modes opératoires de crimes motivés par des haines, elles-mêmes impulsées par des passions contrariées. L’adjectif « passionnel », comme on l’entend dans l’acception collective suppose un passage à l’acte incité par la jalousie et l’effet d’une colère incontrôlable nées d’une relation amoureuse. En effet, ici l’auteur a élargi cette notion pour y adjoindre des meurtres prémédités par la complicité barbare d’amants motivés par la cupidité.
De l’authenticité. La version papier du livre présente chaque affaire avec un dessin ou d’une photo du criminel ou de la victime. De plus, un paragraphe dans une police d’écriture différente met en exergue la stratégie élaborée. Par contre, je trouve superflu l’insert du résumé de la chronologie en caractères gras.
Le choix d’un vocabulaire suranné s’adapte parfaitement à l’époque narrée. J’ai enrichi le mien de : potard, chapelière, femmes accortes.
Un travail de recherche
Chaque récit retrace l’intégralité du processus judiciaire des affaires. La motivation du crime puis sa réalisation vont aboutir à une condamnation et une peine infligées au(x) coupable(s).
Ainsi, commence une relation des antagonistes qui va conduire à l’élaboration du crime, jusqu’à l’arrestation de criminelle, puis la stratégie de défense adoptée par les avocats lors du procès. On assiste à l’attitude déroutante des prévenus, aux circonstances atténuantes ou accablantes retenues. L’auteur complète le tout avec la peine prononcée, dont celle effectivement purgée. Dans la pratique, les jugements sont plus cléments pour les femmes, avec une peine de mort quasi écartée, hormis pour la dernière condamnée Germain Godegroy (guillotinée en 1949).
Les prévenus arrêtés redoutent la peine capitale, « fêtée » par une décapitation publique, ou un voyage sans retour (ou rare) en Guyane. Ici, « Sauver sa tête » prend toute sa valeur ! Alors, pendant leur procès, sans hésitation, ils accablent leur complice. Ainsi, ils rejettent la responsabilité sur l’objet de leur passion enragée. Ils tentent aussi de plaider la folie.
Des crimes décrits
La nature malsaine des complices excite leur perversité qui fourmille de stratagèmes imaginatifs pour déguiser leurs crimes. Ainsi, le but est de commettre un crime parfait, c’est à dire impuni. Par exemple, l’assassinat d’une épouse ou d’un mari encombrants va être truqué en crime crapuleux ou banal accident de voiture. Sinon, pire, la vénalité d’amoureux vont exercer une sauvagerie meurtrière sur des personnes aimantes ou dévouées. D’où la constatation d’une cruauté d’autant plus terrible, que le coupable l’influence pernicieuse du complice sera aussi souvent la personne de confiance de la victime. Une illustration de la comédie humaine pour constater les effet des vices… moteurs des crimes.
Des modes opératoires divers
Après les crimes commis, le sordide produit des conséquences terribles pour se libérer des dépouilles. Finalement, la réalité d’antan n’a rien à envier aux faits divers contemporains ou aux romans policiers les plus noirs. On constate : des dépeçages de corps transportés dans des malles, des saignées pour éviter les coulées de sang importunes, des corps calcinés morts ou vifs, et la suppression de témoins gênants (voire, des enfants). J’ajouterai des amants si passionnés, qu’ils s’adonnent aux plaisirs charnels à côté du cadavre encore chaud de leurs victimes.
Une bonne lecture pour les amateurs des émissions télévisées du même genre, qui trouveront dans ce livre leur bonheur. Le récit rend un bel hommage aux victimes, souvent seulement coupables de faiblesse crédule.
De tous les récits, la mort de la mort de la Mère Roussel est celle qui m’a la plus touchée (Le Viager, 1949).