Quatrième de couverture
L’histoire dit que, lors du naufrage du Titanic, l’orchestre, imperturbable, continue de jouer sa partition jusqu’à la fin. C’est cet Ă©trange sentiment qu’Ă©prouve la psychologue Anna Pavesi, dĂ©tective malgrĂ© elle, lorsqu’elle dĂ©barque au village Calypso : alors qu’a Ă©tĂ© dĂ©couvert le corps sans vie d’un animateur, la routine du club de vacances tunisiens continue comme si de rien n’était. Pour la police locale, cela ne fait aucun doute : il s’agit d’une aventure amoureuse qui aurait mal tournĂ©. C’est lĂ©gion, les liaisons d’un soir dans les clubs de vacances. Et certaines laissent mĂŞme des traces tangibles, surtout Ă l’heure du Web.
Anna, elle, n’est pas convaincue. Il faut dire qu’elle a un certain talent pour dénicher la vérité. Peut-être parce qu’elle sait la chercher : dans la tête des gens.
L’auteur Alexandre Perissinotto
est professeur de sémiologie à l’université de Turin. Il est notamment l’auteur de déjà plusieurs romans : « l’année protecteur a été tué », « à mon juge », « dernière nuit blanche » et « une petite histoire sordide ».
RESUME
Anna, psychologue Ă Bergame, travaille pour les services de la police. Elle est chargĂ©e d’interroger les dĂ©linquants lors des enquĂŞtes criminelles. Un jour, lors de ses courses dans son quartier, elle est sollicitĂ©e Ă titre personnel par Madame Melzi pour aider sa fille Aurora assujettie Ă des troubles bipolaires. Pendant ses vacances en Tunisie avec son petit ami Ermanno, la jeune fille aurait fait une « bĂŞtise » :
Une bêtise. « Bêtise », « espièglerie », « vaurien », au pire « sagouin », les termes vieillis, désirait, désuets, de quelqu’un qui, dans sa vie, n’avait jamais pensé devoir un jour aborder un sujet réclamant des appellations plus adéquates, plus fortes, plus vulgaires.
En l’occurrence cette fois-ci, Aurora aurait assassiné l’animateur du club de vacances Johnny, et aurait tenté de se suicider dans la foulée. Hospitalisée, elle attend un avocat pour un futur procès vue les circonstances où la police la pense coupable. Cela peut bien conduire un emprisonnement à vie.
La conscience professionnelle et un voyage « all inclusive » en Tunisie  stimulent Anna à se rendre sur place pour comprendre le comportement d’Aurora. Le salut de sa défense serait de la faire reconnaître « irresponsable » en application de la Jurisprudence Italienne de la cour de Cassation avec la décision de 2005.
Comble de chance, Marco, peut se libérer pour accompagner Anna. Et lorsqu’ils sont accueillis par Elysabetha la directive du club calypso elle se montre laconique, embarrassée par l’affaire. Avec l’assistance de Marco, Anna interrogera la police puis Aurora pendant la permission limitée des visites à l’hôpital. Ils  enquêtent sur son fiancé et tout témoin potentiel et à qui veut bien répondre. Le temps presse.
Mais quand Marco appelé par son travail, doit repartir pour l’Italie la tâche se corse pour Anna dans cette société machiste. Et pourtant, même seule, cette femme, persévère jusqu’à prendre des risques. Ils vont l’amener hors de la sécurité confortable des confins du village pour comprendre le crime produit dans cette chambre. Il risque de conduire Aurora en prison si on ne peut prouver son irresponsabilité…
MON AVIS
Vacances magiques
La rĂ©fĂ©rence au cĂ©lèbre paquebot du Titanic est subtile : ces vacances  d’Aurora et Ermanno se promettaient inoubliables, paradisiaques. L’exotisme d’un voyage vers le lointain cernĂ© d’un paysage marin baigne normalement les protagonistes dans un romantisme incontestable. Et dans le village de calypso, Ă l’instar de la traversĂ©e sur le Titanic, les Ă©vènements vont brutalement se renverser pour devenir tragiques. En comparaison du Titanic scellĂ© dans un destin dramatique comme celui d’Aurora, la narratrice Anna persĂ©vère malgrĂ© tout dans sa quĂŞte, comme l’orchestre qui continuait de jouer, sans se laisser submerger par la fatalitĂ©.
Le roman illustre une certaine idée de villages de vacances, des clubs de vacances. Si on occulte l’évocation du meurtre, la description du cadre, et une organisation chronométrée des activités pour satisfaire les envies de chacun nous plonge dans l’ambiance. On est prêt à réserver immédiatement sa place. L’exagération offerte aux touristes n’est pas écartée : la nourriture proposée à outrance, le personnel soumis et corvéable, des activités à foison pour l’once d’un ennui potentiel. L’artifice et l’amusement y sont la règle et chacun s’y complait.
Une héroïne normale
La narratrice Anna, conquiert immédiatement le lecteur avec son naturel, consciente de ses propres imperfections. Son âge, ses kilos en trop, son divorce, sa relation avec un homme marié, la rendent sympathique, abordable et attachant. Son courage intelligent captive le lecteur du début jusqu’à la fin du roman. Son couple avec Marco, cet homme tout juste divorcé et accaparé par son travail reste très réaliste. Alors, de ce fait, on la sent être indépendante et maître de ses décisions.
L’enquĂŞte n’est jamais dĂ©laissĂ©e pour les vacances un peu forcĂ©es d’Anna et Marco. Les risques pris par Anna pourraient paraĂ®tre inconsidĂ©rĂ©s jusqu’à annihiler la crĂ©dibilitĂ© du rĂ©cit, mais la narration très cohĂ©rente les a pesĂ©s. De plus, sa prudence reste de mise. On la suit du dĂ©but jusqu’à la fin dans toutes les suppositions qu’elle Ă©chafaude au fur et Ă mesure. Elle examine la culpabilitĂ© d’Aurora, son passĂ© et le rĂ´le de sa bipolaritĂ©.
Pour les férus de données juridiques, référez-vous à la page 43 pour la Jurisprudence Italienne : elle conforte la véracité des analyses d’Anna, enquêtrice improvisée.
Des tunisiens
La déclinaison des personnages nous offre un éventail des vacanciers gavés de toutes les animations sportives et ludiques proposées par les Club. On note aussi une servilité et un dévouement du personnel infaillible pour cette économie du loisir bienfaitrice pour le pays. Omar, Karima, et le photographe en sont des exemples.
L’animateur Jonathan Caputo, dit « Johnny » est le prototype du beau gosse séduisant et séducteur. Voici la version contemporaine et dramatique du personnage de Popeye du film culte « les bronzés ». Toutes les suppositions s’offrent à Anna sur ce bellâtre objet d’animosité des maris trompés :
sauf que malheureusement pour Aurora, c’était elle qui avait accompli ce que les autres avec seulement désiré : sa folie passagère lui avait donné le courage qui leur a manqué,
mais il est aussi Américain :
si la catégorie la plus juste « américain » ?… Quelqu’un qui habitait À deux pas de la Libye avec un secret à me révéler à propos de cet américain. »
Bilan
Ces 260 pages sont agréables à lire…
En partant des troubles bipolaires, on pourrait en déduire une dangerosité potentielle. Alors, pour donner une justesse dans son analyse, le lecteur devra porter une attention particulière sur les analyses de la psychologue. L’enquête menée par Anna nous invite aussi à s’inquiéter sur les conséquences dramatiques qui peuvent survenir lors de voyages, que l’on soit coupable ou innocent dans des pays étrangers… car, toutes les justices ne se valent pas.
Vous pouvez vous procurer le livre ici.
Quelques phrases sympathiques :
Connais-tu quelqu’un qui, en phase maniaque, aurait hypothéqué sa maison de famille pour acheter une Ferrari ? D’ordinaire avec des bipolaires lourds, les parents parviennent à bloquer par différents moyens les possibilités d’achat.
… des pensĂ©es positives, digne d’un manuel d’estime de soi, des rĂ©flexions grenouilles voulant se faire aussi grosse que les bĹ“ufs. Les faits divers Ă©taient pleins de grenouilles qui qui finissaient dans la tout en se croyant devenues des bĹ“ufs.
 « Tu as été ma femme comme un instant de ta vie et, lorsqu’elle est revenue, elle n’était plus la femme de personne. » Léonard Cohen