Chroniques régulières sur des livres, présentations de nouveaux auteurs

💜💜💜💜Les folles enquêtes de Magritte et Georgette (T.3) de Nadine Monfils

Résumé : Œuvre d’art et crime

Des héros sympathiques et loufoques qui enquêtent sur un crime suivent la piste d’une œuvre d’art  disparue.

Georgette et René Magritte s’aiment comme au premier jour dans une vie paisible avec leur chien surnommé Loulou. Mais un soir, Carmen, leur femme de ménage déboule, à l’improviste, toute bouleversée. Elle est persuadée que le couple connaît son autre patron Charles Bogaert, puisque ce monsieur détient une toile de Magritte. Or, Carmen l’a retrouvé inanimé, ainsi que le fameux tableau disparu.
Comme ils habitent à proximité, Georgette et René s’empressent d’accompagner Carmen chez ce voisin pour la rassurer. Ils veulent aussi comprendre pourquoi ce tableau se trouverait là, car René n’a jamais peint « le principe du plaisir » pour lui. Et à leur arrivée, ils constatent la mort de l’homme, et l’absence de la toile. Alors le trio s’éclipse avant d’appeler la police.
Or, bizarrement, l’enquêteur ne retrouve aucun corps dans l’appartement.
Intrigués par ces deux disparitions, corps et tableau, les Magritte partent pour Bruges rencontrer Édouard James, le commanditaire du portrait surréaliste. Et finalement, beaucoup d’interrogations et de cadavres vont poindre au fur et à mesure de leur périple.

MON AVIS 

L’auteure, Nadine Monfils, m’a séduite avec ce roman cosy crime. Extrait d’une série « Les enquêtes de Georgette et Renée », le hasard a mis entre mes mains le tome 3 : les fantômes de Bruges.

Dans une ambiance légère, la série met en scène des héros sympathiques. Ils se retrouvent malgré eux dans le rôle d’enquêteurs pour un crime. Or, on est finalement peu soucieux du sort de la victime. Ici, c’est encore mieux, car elle a disparu !

L’harmonie agréable et la complémentarité du couple Magritte engagent le lecteur à les suivre avec plaisir dans leurs pérégrinations et leurs rencontres.

René use d’une sincérité âpre. Son caractère d’artiste lui permet de s’absoudre des bienséances de la politesse. Sa franchise caustique et son humour de pince-sans-rire amusent (c.f. avec Carmen). Il donne presque envie de devenir son ami malgré une honnêteté parfois trop nette pas toujours facile à encaisser. À ses côtés, Georgette tempère son comportement spontané. Donc, les deux forment un couple sympathique. Leur fréquentation  est recherchée pour la créativité de l’un et la bienveillance polie de l’autre.  

L’apparence lisse des protagonistes se calque finalement sur ceux d’Agatha Christie. Dans la lignée des Beresford les enquêteurs amateurs dans « Le Crime est notre affaire », font preuve d’une perspicacité de fins limiers. En effet, la diversion paisible de leurs attitudes et de leurs conversations dissimule une déduction efficace et imparable. Ici, l’action se situe en Belgique.

Du coup, ce roman choral offre un éventail de personnages tous loufoques à leur manière, divertissants et intéressants, à l’instar de la famille Rodenbach. Elle se compose du fils homosexuel affiché et cocu notoire, à la fille célibataire délaissée et obsédée à la folie pour le flirt d’un pseudo-amour… jusqu’à la matriarche intraitable dont tous convoitent la fortune.

J’ai beaucoup apprécié une version de fresque policière pour aborder un peintre renommé. Je le connaissais peu. Pourtant ses toiles familières appartiennent à notre univers visuel. Ce roman se concentre sur la toile très connue « le principe du plaisir » (c.f. l’image infra). Personnellement, je découvre alors son titre et de fait, l’identité de son créateur. Ce récit invite à rechercher d’autres éclaircissements. En fin de chronique.

Citation

Chez les bourgeois, les faux-semblants se portent en broche sur le revers de l’élégance parfumée aux mensonges.

Voici ce que j’ai trouvé sur archive.com

Descriptif de la toile "principe du plaisir"

« Le principe du plaisir » écrit en 1937, présente plusieurs thèmes reconnaissables dans l’œuvre de René Magritte: le paradoxe visuel et intellectuel, le changement surnaturel du familier et la tension entre le visible et le caché.

Il s’agit d’un portrait d’Edward James, un aristocrate et héritier de millions de personnes qui est devenu un poète excentrique et un patron influent des surréalistes. En 1937 Salvador Dali lui a présenté Magritte. Et dans les deux ans, James a commandé à l’artiste plusieurs peintures, y compris deux portraits – cette œuvre et « Reproduction interdite ». Magritte avait introduit le concept du principe de plaisir avant même de rencontrer James. En 1936, il fit un croquis à l’encre similaire sur la première page d’un livre manuscrit dédié au poète surréaliste Paul Eluard. En juin 1937, l’artiste écrit à James: «J’ai fait un tableau représentant une personne dont la tête est légère… Je suppose que c’est une esquisse préliminaire, en réalité le tableau doit encore être peint. Mais comme il vous est destiné, ne pensez-vous pas qu’il devrait avoir une  personnalité reconnaissable? Si vous aimez l’idée, tout ce que vous avez à faire est de prendre une photo de face à la table avec les bras croisés posés dessus et de poser une pierre à droite, pas trop loin de votre main…. James a chargé un autre surréaliste de prendre une telle photo – Manu Ray... Lorsque Magritte a terminé le tableau en septembre et l’a envoyé au client. Il a écrit en réponse: « Mon ami et moi pensons que c’est un énorme succès, en fait un travail brillant. ». Le principe du plaisir incarne l’intérêt de Magritte pour ce qui est caché dans notre réalité visuelle. Tout au long de sa carrière, l’artiste a utilisé une imagerie surréaliste qui s’oppose à notre passion pour les visages cachés, en particulier. La pomme couvre le visage de l’homme dans le tableau emblématique « Le fils de l’homme » et les couvre-lits blancs sont des héros « Les amoureux »… Dans l’une de ses rares interviews (et Magritte ne pouvait pas supporter la publicité et les discussions sur son travail), l’artiste a déclaré: «Tout ce qui est visible cache quelque chose. Nous voulons toujours voir ce qui se cache derrière ce que nous voyons. Cet intérêt peut prendre la forme d’un sentiment assez contradictoire, une sorte de conflit entre le visible-caché et le visible-évident « … Dans The Pleasure Principle, il construit cette collision sur un paradoxe: nous avons besoin de lumière pour voir, pas d’obscurcir le visage d’une personne dans une pièce sombre – tout comme nous nous attendons à ce que le miroir réfléchisse, pas cache le visage sur la toile. »… Le titre du tableau fait référence à un élément clé de la psychanalyse freudienne, qui a servi de fondement philosophique au mouvement surréaliste. Cependant, Magritte lui-même a mis en garde contre l’interprétation et l’analyse de ses noms: «Les noms des peintures ne sont pas des explications, et les peintures ne sont pas des illustrations des noms. Le lien entre le nom et l’image est poétique, c’est-à-dire qu’il ne reflète que certaines caractéristiques du sujet que nous ne réalisons généralement pas, mais que nous comprenons parfois intuitivement lorsque des événements inhabituels se produisent qui ne peuvent pas être expliqués logiquement « . Edward James, poète et collectionneur passionné, a joué un rôle particulier dans le développement du surréalisme, en soutenant des artistes tels que Salvador Dali, René Magritte, Pavel Chelischev, Leonor Fini et Leonora Carrington… Il a fourni un espace de créativité à ses collègues peintres, en particulier, les trois premiers ont vécu et travaillé pendant longtemps dans ses maisons du Sussex et de Londres. James a passé de nombreuses commandes, créant l’une des plus belles collections d’art surréaliste au monde (en savoir plus sur lui dans l’article Arthive « Le jardin magique d’Edward James – Saint patron des surréalistes »). Le principe du plaisir est resté dans la collection d’Edward James jusqu’en 1964, lors de son transfert à la Fondation qu’il a fondée. En 1979, un autre collectionneur privé a acheté la toile gardée jusqu’en novembre 2018. Aux enchères chez Christie’s avec une estimation préliminaire de 15 à 20 millions de dollars, le prix final (prime comprise) était de 26,8 millions, ce qui était un record d’enchères pour les créations de René Magritte. Auteur: Vlad Maslov

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le principe du plaisir