Chroniques régulières sur des livres, présentations de nouveaux auteurs

💜💜💜💜 JUSTE AVANT DE MOURIR de S.K. Tremayne

RESUME

Presse de la Cité
21/03/19
400 pages
GB. Dans le Dartmoor. Kath Redway souffre d’un traumatisme crânien léger une suite à un accident de voiture. Son amnésie rétrograde trouble sa mémoire de manière temporaire sur ses actes juste avant l’accident. Mais en attendant de la recouvrer, pèse sur Kath un sentiment de culpabilité et de stupéfaction quand elle apprend qu’elle vient de réchapper à son suicide. En se jetant dans le lac au volant de sa voiture, un promeneur providentiel l’aurait sauvée d’une probable noyade mortelle.
Sa confusion la perturbe d’autant plus qu’elle ne comprend pas son acte : son couple avec Adam ne pose à première vue pas de problème, et elle se sait indispensable pour son adorable petite fille Lyla fragilisée par le trouble autistique.
La culpabilité d’avoir voulu en finir avec la vie la ronge. Ainsi, en attendant que sa mémoire lui revienne, elle interroge toutes les personnes susceptibles de l’aider à retracer son emploi du temps avant l’accident. Mais plus elle en apprend, plus le brouillard s’épaissit sur ses motivations et sur les « alibis » de ses proches…

MON AVIS

Je remercie vivement le site Netgalley et les éditions Presses de la cité, pour la découverte de cet auteur et de son dernier roman. A partir d’une tentative de suicide de Kath, notre héroïne, nous immergeons dans une ambiance trouble de légendes ancestrales, sur la lande sauvage de Dartmoor dans le Devon au Sud-Ouest de l’Angleterre.

Le roman riche de quelque 400 pages vous accaparera plusieurs heures – à mettre dans la catégorie « prévoir du temps »- mais sa lecture addictive rend difficile le fait de le lacher !

UNE INTRIGUE CAPTIVANTE AUTOUR DE KATH

Cette ambiance environnante inquiète et la recherche de Kath pour comprendre son geste va nous emporter avec elle dans sa quête tumultueuse. L’humanité de notre héroïne nous saisit. Elle a su faire fi des conventions sociales et familiales par amour, et apprend à gérer la différence de sa fille au quotidien. Et pourtant, elle va devoir passer outre les observations qu’elle fait face à un mari distant et une petite fille très intuitive, franche et perspicace. Un entourage compliqué.

On suit Kath sans problème dans sa quête de son suicide désiré… ou organisé. Ses interrogations et inquiétudes nous assaillent autant. Et, comme elle, on sera stupéfait des dangers et des vérités auxquels elle devra faire face. De plus, son environnement perturbant aggrave son jugement devenu nébuleux. MAIS PATIENCE ! il faudra attendre les dernières pages pour comprendre le très déroutant dénouement.

AUTOUR D’UN SUICIDE DOUTEUX

La narration à la première personne de Kath expose ses doutes sur les motivations de sa tentative de suicide. Dans les affres de son amnésie, elle culpabilise et essaie de la comprendre : rien ne la justifie au vu des inconvénients de sa vie actuelle.  Les troubles autistiques, et la baisse dans l’échelle sociale avec son mariage ne l’affectent pas au point de commettre un acte si désespéré. Alors sans vouloir être paranoïaque, ses doutes et ses recherches vont se porter dans toutes les directions. Le retour de sa mémoire même avec des subterfuges olfactifs tarde.

Elle confie sa pleine confusion, à sa belle-sœur Tessa, et va jusqu’à penser que :

« J’ai été ensorcelée ou hypnotisée. Contrainte, d’une manière ou d’une autre, de faire ce que j’ai fait. Et ça continue. Ou alors, je suis en train de perdre la tête. »

L’inquiétude de Kath croît d’autant plus qu’elle ressent une distance de son mari et sa fille vis à vis d’elle. Dans sa solitude, et son isolement elle en déduit que quelqu’un a voulu mettre en scène sa mort désirée. Sans compter qu’elle se sent surveillée !

« Je pense aussi que quelqu’un qui me connait, ou sait des choses sur moi, a campé dans cette grange, pas loin de la maison. Là encore, ça pourrait être mon mari. Et ma fille, très certainement autiste, chante une chanson prédisant une mort imminente que personne ne lui a apprise. Ah, au fait, j’ai également vu le fantôme de ma mère sur la lande autre jour, et entendu sa voix d’outre-tombe dans une église. »

LES MYSTERES DU DARTMOOR

Ce roman procure une présentation originale d’une facette du Devon. Les paysages flanqués d’une telle rudesse climatique favorisent une opacité visuelle du cadre. Le vent, la pluie, le brouillard inspirent une ambiance tumultueuse.

A cela s’ajoutent des légendes séculaires sous l’influence de sorcières, fantômes, démons, ou diables. Ce cumul d’éléments obstruent la clairvoyance de Kath, et la nôtre. Ces rappels tout au long du romans émoustilleront les amateurs de maléfices et présages. A propos de la croyance autour des suicides, je ne résiste pas à l’envie de vous inciter à approfondir la légende de fameuse tombe de Kitty Jay plusieurs fois évoquée.

Le vocabulaire évoque les caractéristiques géologiques locales : les ammils, les voogas, les pierres percées, tors, cairn, ainsi que les noms géographiques affiliés à ces figures naturelles : le Walla Brook, Amicombe Hill, Widecombe, Vixen Tor, le lac de Burrator, Plymouth…

 Avec notre héroïne nous foulons l’étendue ce parc national du Devon dont on découvre par la nature sauvage de sa faune, sa flore ainsi que les coutumes des habitants.  Dans ce microcosme, Adam son mari, Ranger, se complait de cette vie au grand air, où le couple s’accommode de leur modeste ferme d’Huckerby, pour s’isoler. Leur fille Lyla, forte d’une communion particulière avec les animaux, apprivoise ainsi sa singulière sociabilité. Ce cadre sauvage instaure une fragilité dans les certitudes de chacun.

L’AUTISME

Pour mieux aiguiser le suspens ici, les troubles autistiques ajoutent du mystère et perturbent les parents spectateurs devant leur enfant « différent » et parfois rejeté.  Sensible et gentille, la vulnérabilité de la fillette nous touche.

« enfance spéciale, adorable, drôle et touchante, pour peu qu’on lui donne la chance de le montrer. »

Son intelligence  affublée d’une hypersensibilité émeut mais son côté excentrique avec son goût prononcé  relation particulière avec les animaux vivants ou morts inquiète. La fidélité et l’abnégation de Felix et Randal sidèrent et forcent l’admiration.

C’est alors une illustration des particularités des enfants atteints d’autisme. Ici, Lyla paraît être « asperger », une forme plus « noble » mais non moins difficile à appréhender par l’entourage. L’hyperlexie (trop de lecture), la prosopagnosie (perte de la faculté de reconnaître les visages), les mouvements de sa main, les tics, toutes ces « manies » la rendent bizarre pour ses camarades d’école qui la dédaignent et la décrivent comme :

« La fille qui n’est pas là »… C’était à la fois cruel, et brutal et terriblement vrai.

Un roman dense, où le suspens est soumis à un environnement baigné de légendes colportées. Notre héroïne malmenée par des réminiscences d’une mémoire capricieuse, va devoir éclaircir une nébuleuse de questions.

Vous pouvez vous procurer l’ouvrage chez votre libraire, chez DECITRE ou à la FNAC.
Votre avis sur la chronique ou le livre est le bienvenu…

Reader Comments

  1. Bravo pour cette chronique Annec.
    C’est l’auteur qui a écrit « Le Doute » et « la menace ». J’ai adoré « le doute » et « la menace » figure dans mon énormeeee PAL. Je vais pouvoir y ajouter celui-ci certainement..

  2. Je n’ai pas lu « le doute », alors merci du conseil et je l’ajoute à ma PAL. merci de ta visite Aydan ! à bientôt j’espère !

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