RESUME
Carpentras. Nous assistons à l’intimité de plusieurs couples pendant la diffusion d’une émission de « l’affaire non élucidée », minute par minute. Cette affaire les concerne tous directement ou indirectement car ils connaissaient tous la victime et sa famille. Chacun avait participé à la recherche de la petite disparue, et partagé la douleur des parents.
L’affaire remonte Ă 19 ans dans la banlieue « les grands chĂŞnes », une banlieue populaire de Carpentras. En 1994, Laetitia Doussaint une petite fille d’une dizaine d’annĂ©es avait disparu alors qu’elle voulait aller acheter des crayons de couleurs. Après une mobilisation spontanĂ©e et impliquĂ©e du voisinage pour les recherches, elle a Ă©tĂ© retrouvĂ©e dans les bois environnants, violĂ©e et assassinĂ©e. Malheureusement, le criminel n’a pas pu ĂŞtre identifiĂ© depuis, malgrĂ© de forts soupçons sur une personne. On est presque certain nĂ©anmoins qu’il s’agit de quelqu’un de l’entourage proche de la famille de la victime.
Aujourd’hui en 2013, devant leur poste de tĂ©lĂ©vision, quatre couples scrutent l’Ă©mission avec Ă©motion. Monsieur et Madame Vasseur, Monsieur et Madame Bidault, Monsieur et Madame Lemoual, et Monsieur et Madame Doussaint (l’oncle et la tante de la fillette), les proches des parents de Laetitia Ă l’Ă©poque du drame, revivent le fait divers de A Ă Z. Tous ont Ă©tĂ© marquĂ©s d’une manière ou d’une autre par ce fait divers.
Durant l’enquĂŞte, les quatre hommes des couples prĂ©-citĂ©s, avaient Ă©tĂ© soupçonnĂ©s les uns après les autres, en vain. Un climat dĂ©lĂ©tère a intoxiquĂ© les relations amicales de ces voisins d’alors. Puis, l’affaire a Ă©tĂ© oubliĂ©e, et leur vie a Ă©voluĂ© : certains ont changĂ© de quartier, d’autres ont sombrĂ© dans la dĂ©pression, d’autres encore refaire leur vie autrement.
Mais ce soir, la diffusion de cette émission « affaire non élucidée » met en émoi l’épouse du véritable coupable resté impuni : après des années de doutes, elle vient toute juste de dénicher la preuve de son crime. Alors, ce soir ou jamais, avec la connivence de « Grosse Tête », le commissaire en charge de l’enquête, celle-ci veut rende justice à la fillette et mettre au pied du mur son criminel de mari pour le contraindre à avouer.
Lequel de ces hommes a pu commettre un tel forfait ?
MON AVIS
Le hasard de la mĂ©diathèque m’a conduite Ă cet auteur notoire sans pour autant l’avoir jamais lu. Avec cette première lecture de son cru, j’ai Ă©tĂ© sĂ©duite par un scĂ©nario original selon moi. Une histoire Ă´ combien rĂ©pandue dans les mĂ©dias Ă la rubrique des faits divers : l’enlèvement d’une fillette, victime d’une agression sexuelle suivie d’un meurtre.
UNE CONSTRUCTION NARRATIVE ORIGINALE
Le contenu du prologue paraît en dévoilé trop ; mais non, il pose avec perfection les jalons. Parfois inutile, celui-ci éclaire judicieusement le roman.
Son annonce est directe : un criminel impuni après tant d’années vit tranquillement dans son pavillon avec sa famille. La vie a suivi son cours pour lui. On ne sait pas à quoi s’attendre avec cette donnée, puisque l’émission porte sur une affaire non élucidée. Trop de révélations ? Alors on s’interroge de savoir comment une seule émission va parvenir à faire arrêter un criminel, dix-neuf ans après. Les chapitres s’enchainent ensuite, et alternent le vécu de chaque couple depuis l’affaire de la disparition de Laetitia.
Le lecteur va se demander si sa connaissance de certains indices ne va pas rompre le charme du suspens. Et bien, non ! On sait que le criminel court après tant d’années ; et que son épouse tient à ce qu’il regarde l’émission pour recueillir et saisir le moindre trouble.
Mais parallèlement, le lecteur partage le secret de son épouse qui a découvert sa culpabilité sa détermination à le faire arrêter. Lui, ignore la clairvoyance de sa femme qu’il sous-estime.
Et là , le suspens repose sur le procédé qu’elle va utiliser pour qu’il se trahisse. Et surtout, va-t-il se trahir ?
UNE SOIREE DEVANT LA TELEVISION
Le roman se cantonne au rĂ©cit d’une soirĂ©e durant la diffusion d’une Ă©mission populaire, minute par minute Ă partir de 22 h 25, pour s’achèver Ă 23H30. Très bien argumentĂ© comme les Ă©missions du genre, l’ordre chronologique de l’affaire est respectĂ© et relatĂ© : de la disparition aux avancĂ©es de l’enquĂŞte. Aguerri Ă cet exercice tĂ©lĂ©visuel, l’auteur nous procure l’impression rĂ©elle d’assister Ă une Ă©mission de cet acabit, un style aujourd’hui bien prisĂ© au vu de leur nombre important.
On se retrouve dans le salon avec dans ces couples, chaque tĂ©lĂ©spectateur troublĂ© d’un passĂ© toujours vif Ă l’esprit, commente les images. Le lecteur, lui, sait que le coupable est l’un de ces hommes, mais lequel ? Il tente alors, de le dĂ©nicher et effectue donc un travail de rĂ©flexion… de doute, de suppositions… avec les Ă©lĂ©ments soumis.
Dans leur canapĂ©, le vĂ©cu et le ressenti de chacun sont relatĂ©s Ă la troisième personne. Au fur et Ă mesure des diffĂ©rents passages de l’Ă©mission sur l’enquĂŞte, des procĂ©dures, des auditions des tĂ©moins, on analyse le souvenirs de leur propres actions et rĂ©actions. Les observations et remarques de leurs Ă©pouses de l’époque sont aussi rapportĂ©es.
Et au milieu de ces chapitres narratifs, s’en insèrent d’autres intitulés « Elle », ou « lui » à la première personne. Ils affichent les pensées du coupable imperturbable devant les images d’un passé qui ne lui laissent aucun remords. Il s’ignore démasqué par son épouse, qui, elle a mis au point un stratagème pour tenter de le faire craquer… Lequel de ces hommes est-il ?
Patience, patience, le lecteur devra attendre les toutes dernières pages pour le savoir… mais avec cette écriture fluide, on vient vite à bout de ces quelque 300 pages à lire « le temps d’un week-end ».
Il a l’air intĂ©ressant ce roman.
oui, captivant…. On a l’impression de faire nous-mĂŞme l’enquĂŞte.