RESUME
RESUME
Darra, banlieue populaire de Brisbane dans le Queensland. Australie.
Eli, fait montre d’une grande maturité pour son âge. Il faut dire qu’à 12 ans, la vie ne l’a pas épargné : son père a failli les noyer avec son frère, August, enfermé depuis dans un mutisme total. Leur mère, refait sa vie avec Lyle un dealer d’héroïne et le baby-sitter des enfants Eli et August, Slim, est un ex-taulard. Slim – Arthur Halliday. Devenu âgé, cet ancien meurtrier, surnommé « Houdini de Boggo Road » à cause d’une devenue évasion notoire à travers le pays, s’est métamorphosé en baby-sitter inoffensif. Lié d’amitié avec Eli, il confie à l’enfant l’élaboration de ses plans d’évasions, sa philosophie de la vie et ses aspirations et celles des autres prisonniers.
Le mutisme de l’aîné August, soudera les deux frères dans l’adversité. Le gestuel de la main qui écrit ses paroles dans les airs est le moyen de communication d’August que seule la famille sait décoder.
Officiellement, Lyle travaille pour un richissime Titus Broz à la tête de Human Touch une société spécialisée dans les prothèses et orthèses destinées aux amputés. Mais en marge de cette activité de façade, se développe un commerce plus lucratif d’héroïne. Perçue comme solution d’assouvir une soif de réaliser un rêve, Lyle se confectionne une réserve d’héroïne à revendre ultérieurement, avec la complicité de sa famille.
Mais un soir, Titus Broz découvre le double-jeu de Lyle. Par l’intermédiaire d’Iwan Krol son impitoyable homme de main, la vengeance sans appel va s’abattre sur toute la famille. Lyle va disparaître, et suite à un tabassage en force, Frances est internée en prison à Gobbo Read. Mais avant, il inflige une torture pour faire parler les enfants, jusqu’à amputer Eli de son index… son index « porte-bonheur ». En vain.
Encore mineurs, la garde d’August et d’Eli va être confiée à leur père Robert, solitaire et un peu alcoolique.
A sa sortie de prison, Frances décide de partager sa vie et celle des garçons avec son unique soutien durant son emprisonnement : Freddy, le meilleur ami de Lyle. Mais Eli le soupçonne d’avoir dénoncé Lyle à Titus Broz… Alors, devant cette discorde, August et Eli, retourneront chez leur père. Et, Frances va les rejoindre, poussée par la violence conjugale de Freddy.
Les années passent. Eli se rappelle des enseignements de Slim des articles lus sur les exploits de criminels et se met en tête d’écrire pour le Courrier-Mail, comme sa journaliste favorite Caitlyn Spies.
Mais malgré son obstination, ses relations insolites, et sa maturité, Eli va se heurter à l’implacabilité du rédacteur en chef. Sa carrière de journaliste est compromise et il devra alors s’armer de courage, jusqu’à se mettre en danger pour changer la donne…
MON AVIS
Mes remerciements à Netgalley et les Editions Harpercollins d’avoir découvert cet auteur australien et son nouveau roman. D’une densité considérable (plus de 500 pages), il nous transporte pendant plusieurs heures de lecture dans un autre univers.
Voyage dans une Australie sombre. Oubliez les grands espaces avec les animaux typiques… Non, ici, le réalisme d’une province multiraciale et d’une société corrompue dans des cartels de drogue nous frappe. La dureté d’un récit au premier abord familial, mêle drogue, la corruption et vie pénitentiaire. S’y glisse néanmoins une certaine poésie ainsi que beaucoup d’humanité.
Le thème de « la bonté » est récurrent. Devient-on mauvais, ou est-ce la société qui nous transforme ? Les multiples rencontres d’Eli l’ébranleront sur cette question. Car, comment comprendre que des hommes bons peuvent commettre des actes condamnables, tandis que d’autres créatures monstrueuses sont reconnues pour leur bonté factice ?
UN MUTISME SALUTAIRE
Le héros Eli, détaille les membres et l’histoire de sa famille recomposée, originale dans sa substance. Les non-dits règnent mais pacifient quand la vérité peut nuire à l’ambiance. Pèsent beaucoup de mystères autour de notre héros animé d’une curiosité fantastique.
Avec son « handicap », un mutisme entretenu par ses soins, August, son aîné a adopté cette règle de prudence. Il donne le ton en limitant le nombre d’initiés pour le comprendre. Sans l’avouer, ils ont compris que « cet enfant bizarre » en sait beaucoup plus qu’il n’en dit. En plus ses paroles « en l’air », parfois métamorphosées en oracle. Alors dans ce climat assez austère, chacun se tait sur ses actes, sa culpabilité ou ses remords.
Eli, un peu à part, se trahit par sa franchise et sa loyauté et sa droiture dictent ses actes. Une certaine poésie surgit de son récit, imprégné de couleurs, jolies descriptions. Ses rêves ponctuent ses souffrances physiques et morales.
La mère, elle, telle une poupée, se laisse porter par les évènements, effacée, faible et sans relief ; ce doit être sa bonté qui fait qu’elle suscite autant d’attachement des autres personnages.
DES ADOLESCENTS DANS UN MONDE D’ADULTES.
Une belle leçon de vie : on admire le courage des deux enfants obstinés dans la réalisation de leurs projets. Même dans l’adversité, leurs objectifs sont dictés par la volonté de faire du bien aux autres.
Une illustration ici, du handicap (j’inclus sciemment le mutisme d’August) à divers degrés avec la générosité et la responsabilité d’Eli à traduire les paroles de son frère. Quant à August, son dévouement à l’égard de la maladie rare de leur camarade de l’école est remarquable et remarqué.
Slim, en criminel notoire comme baby-sitter offre une fréquentation originale aux enfants avec une fine dose d’humour. Son expérience carcérale va les instruire sur ce monde fermé où la lecture et l’écriture sont les presque seuls soupiraux de l’esprit sur l’extérieur. Son engagement auprès des enfants redonne de l’humanité à des criminels sans vergogne. En effet, Slim raconte son expérience extraordinaire d’évasion et dispense ses leçons de vie et sa philosophie à August et Eli.
J’AI MOINS AIME :
J’ai regretté devoir patienter jusqu’à la 60/80ème page pour être happée par une accélération de l’intrigue, j’étais à la limite d’abandonner. À partir de la scène d’anniversaire, l’action s’accélère enfin.
La narration à la première personne d’un ado d’une douzaine d’années laisse songeur au début. Ses réflexions, et son recul abouti, n’est pas adaptée à son âge mais sa maturité fruit de son vécu, explique son côté « spécial ».
L’auteur
Trent Dalton est journaliste pour The Weekend Australian Magazine et scénariste. Il a été plusieurs fois récompensé pour ses articles, notamment son recueil Detours : Stories from the Street (2011), résultat de trois mois d’immersion dans des communautés de sans-abris de Brisbane. Son travail de scénariste a également été couronné de prix prestigieux comme le prix Canal+ International, décerné par le Festival du Court-Métrage de Clermont-Ferrand.
Vous pouvez vous procurer l’ouvrage chez votre libraire, chez DECITRE ou à la FNAC.
Votre avis sur la chronique ou le livre est le bienvenu…
Un avant-goût en citations :
« Quatre facteurs entrent en jeu pour une bonne évasion : bien choisir son moment, avoir un bon plan, compter sur sa chance et toujours garder la foi. »
« Il a juste décidé de faire ce que lui dictait son cœur. C’est peut-être ce tout ce qui compte pour devenir un héros. Alex, ce que nous dicte notre cœur. Sortir de notre zone de confort. »
« Il existe toutes sortes de méchants derrière les barreaux, explique Slim. Il y a des types qui commencent bons et deviennent méchants ; des types qui ont l’air méchants mais ne le sont pas du tout ; et puis il y a ceux qui sont mauvais jusqu’à la moelle, parce qu’ils sont nés comme ça. »
« Fais ton temps avant qu’il ne fasse la peau. »
Slim dit que j’ai un esprit adulte dans un corps d’enfant. Je n’ai que 12 ans, mais il estime que je peux encaisser les sales histoires. »
« La pire espèce de toxicos, c’est celle qui pense ne pas être la pire. »
« […] la pêche, ça n’a rien à voir avec le fait d’attraper quoi que ce soit, tout tient dans le fait de s’asseoir et de savoir attendre. Ce n’est qu’une affaire de rêveries ».
Je l’ai commencé en parallèle de ma lecture. Je comprends ce sentiment d’avoir envie de laisser tomber du début, j’ai le même. Vu ta chronique, je vais m’accrocher.
Oui, il faut rentrer dedans, c’est mon reproche. Ensuite, on s’attache ensuite à Eli, même si parfois quelques longueurs… Ce n’est pas le genre de livre qui se lisent en un Week-end.