RESUME
Le roman se situe en huis clos dans une sorte d’hospice mélangeant différentes sortes de patientèle : personnes âgées et personnes trisomiques. Là , une bande de vieux, dont Serge Daudeau et ses voisins de chambres de la maison de retraite coulent leurs journées à observer le personnel soignant chargés de répondre à leurs besoins.
 Mais deux personnes de la bande décèderont dans les mêmes conditions subitement. Serge Daudeau, convaincu qu’un tueur en série sévit dans la maison de retraite parmi le personnel soignant met alors tout en œuvre pour trouver le coupable. Ses déplacements imposés à s’effectuer en fauteuil le limitent dans cette entreprise. Il n’alerte pas sa fille lors de ses visites quotidiennes, mais sollicite l’aide de son fils Didier qui vit à l’autre bout de la France. En vain.
En unique dernier recours, il s’associe à Watson son compagnon de table. Il sympathise avec ce « trisomique » une complicité et une confiance indéfectible grandiront tout au long de l’enquête que Serge Daudeau adaptera au gré des limitations de Watson. A force de rebondissements et de ténacité, nos enquêteurs amateurs soupçonnent, puis innocentent des pseudos coupables et finissent par attirer Didier sur les lieux. Car oui, Serge en est convaincu, il est sera la prochaine victime du tueur. L’aide de Didier préviendra-t-elle un crime ?
MON AVIS
J’avoue mon appréhension au prime abord sur le titre un peu loufoque mais je n’ai pas regretté mon choix : voici un excellent mélange des genres. Le « vioque » et « le handicapé mental » est une association audacieuse de l’auteur, d’abord pour le politiquement incorrect et pour la crédibilité du récit. Mais Kamash a assuré avec SUCCES l’accroche du lecteur (en tout cas, moi) avec ses personnages principaux très attachants.
Il faut dire que le binĂ´me des hĂ©ros se complète : l’un les bras et les jambes, et l’autre la tĂŞte… un cocktail atypique oĂą le narrateur n’hĂ©site pas Ă se moquer de ses propres travers, et ceux de son partenaire d’enquĂŞte. Le tout est savoureux d’humour, pour qui sait accepter de lire et prendre la rĂ©alitĂ© au deuxième degrĂ© pour apprĂ©cier la texture d’un roman agrĂ©able.
La poésie et les jeux de mots pimentent le récit. Pour preuve :
– « Dans mon esprit Pinel rimait avec Opinel, ce qui ne faisait qu’accroitre ma certitude que le bonhomme Ă©tait un coupable pas très très innocent ».
– « Je prĂ©fère mourir heureux car il vaut mieux regretter de mourir que dĂ©plorer ĂŞtre vivant »
Le délire du vieux dans ses cauchemars, ou non cauchemars nous emportent. En tout cas, sans faire abstraction de sa dureté, l’univers de la maison de retraite est dépeint avec des touches humouristiques.
L’auteur exagère ou minimise par volonté les facultés de Watson, mais les moqueries ou les remarques du narrateur ne sont en rien offensantes, car la nécessité de ses missions et sa volonté de les assumer lui rendent vraiment hommage. ET par extrapolation, on a tous un rôle à jouer… J’ai ressenti beaucoup d’humanité dans le livre, malgré une intrigue un peu « cruelle » mais néanmoins transmise avec la légèreté adéquate.
L’auteur s’est inspiré de son père pour le personnage de Serge et lui a rendu selon moi, un bel hommage, et pour le personnage du « trisomique » comme il s’amuse à le qualifier, j’ai presque éprouvé une petite déception en lisant à la fin qu’il était fictif. En tout cas, je ne sais pas s’il existe une maison de retraite où se mêlent des « personnes âgées » grabataires ou pas et « personnes handicapées mentales » mais si la collaboration peut s’apparenter à celle décrite par Kamash (l’auteur), la question serait à étudier…
Dans l’idée des relations transgénérationnelles réussies, ce livre m’a remémoré un autre livre : Et puis Paulette… (dont je parlerai dans une chronique à venir). Je mettrai ces deux livres dans la même catégorie (hormis l’intrigue policière, évidemment).
Voici un échantillon de quelques lignes qui m’ont fait sourire :
« Je souriais bêtement. Tu as beau faire ce que tu veux, quand tu as un dentier, quand tu souris c’est toujours bêtement. »
« Les sanglots longs des violents automnes bercent mon cœur d’une douceur qui barytonne ».
« Manquer à ce point de malignité est, à coup sûr, une infirmité dans ce monde qui est le nôtre. Seuls survivent les plus féroces, les plus mesquins, les plus aptes à marcher sur leurs congénères pour réussir ».
« […] unis comme les cinq doigts d’une main ridée et tremblante. Les cinq incontinents régulièrement baignés par l’Océane pacifique, par la mère des sarcasmes, la peau de vache d’infirmière en chef, ou l’amer casse-pied, le chef en personne. »
Merci d’avoir lu ma chronique ! Et vous, que pensez-vous de ce livre, avez-vous envie de le lire après cette chronique? Votre avis nous intĂ©resse…
Bonjour,
Je suis tout d'abord ravi que vous n'ayez pas été refroidie par le sujet qui peut mettre mal à l'aise certains lecteurs comme j'ai pu le constater sur des salons littéraires.
J'aimerais, en premier, rectifier une petite chose. Vous notez « auto-édité » sous la couverture du livre. J'ai l'habitude de dire que je ne m'auto-édite pas, je m'édite. Bon, il est évident qu'à l'oral, la blague passe mieux. Cependant, si maison d'édition ne compte qu'un seul auteur vivant (moi), puisque je fais beaucoup de rééditions de la littérature populaire policière dont je suis un passionné, chaque ouvrage subit un travail éditorial à part entière (les miens plus que les autres puisque, en plus de les faire corriger, ceux-ci sont travaillés et retravaillés) en plus d'une sélection (certains de mes romans ne sont pas édités car pas assez bons).
La seule différence existant entre mes rééditions et mes éditions, c'est que mes ouvrages sont corrigés en fonction de la "graphie rectifiée de 1990", ce qui peut surprendre, je le conçois, alors que les rééditions sont recorrigées en fonction de l'ancienne graphie traditionnelle.
Pour le roman, lui-même, comme vous l'avez si bien signalé, le personnage principal m'a été inspiré par mon père qui, suite à diverses maladies et à un AVC a souffert de démence vasculaire l'obligeant à être placé dans une maison de retraite médicalisée car incapable, d'un jour à l'autre, de marcher, manger normalement, et faire certains gestes du quotidien.
Vous vous demandiez si certains instituts regroupaient des personnes âgées et des personnes trisomiques, c'était le cas de la maison de retraire où avait été placé mon père. Mon paternel étant plus apprécié par les trisomiques, avec lesquels il mangeait, que par les autres retraités, cela m'a inspiré cette histoire et ce drôle de duo.
Pour information, on peut retrouver les prémices du personnage de Serge Daudeau dans mon précédent roman « P'tit Prolo » qui est une biographie de mon père depuis sa naissance jusqu'à son décès dans ladite maison de retraite.
Dernier information. Effectivement, je précise que le personnage de Waston est fictif et que j'ai absolument tenu à ne pas m'informer spécifiquement sur la trisomie 21 et à proposer un personnage le plus crédible possible. Car, ce qui m'intéressait avant tout, c'était de conserver l'image que je me faisais de la relation entre mon père et ces trisomiques. Car, contrairement à mon personnage dans le roman, je n'ai pas eu le temps de traverser la France pour assister de visu à cette relation, le cancer l'ayant emporté en quelques jours juste avant l'été.
Enfin, pour en revenir à votre lecture, je suis heureux de constater que celle-ci vous a plu et, plus encore, que mon père est encore capable de faire rire de là -haut.
Si, en plus de faire rire, les quelques insertions que je fais quant au regard que la sociĂ©tĂ© et les gens peuvent avoir sur les trisomiques, alors j'aurais fait d'une pierre trois coups : rendre mon père immortel, lui permettre de continuer Ă faire rire et faire rĂ©flĂ©chir sur la « normalitĂ© »…
Merci.