Chroniques régulières sur des livres, présentations de nouveaux auteurs

💜💜💜LE DOUZIEME CHAPITRE de Jérôme Loubry

RESUME

Ed° livre de poche
350 p
sept 2019
2017. L’enfance de David, aujourd’hui écrivain, revient à sa mémoire sous l’effet d’un courrier dont  les chapitres successifs retracent son été de  ses 12 ans en 1986. Désorienté par les révélations contenues dans cette missive mystérieuse, David contacte son éditeur Samuel. Celui-ci se trouve être aussi destinataire de ces pages, car il faut dire que ces deux amis sont concernés au même titre par cette période relatée. Ces feuillets réceptionnés détaillent, chapitre après chapitre, leur été passé ensemble. Qui a bien pu le leur envoyer ? Et surtout dans quel but ? Des fantômes vont-ils ressurgir ? Il faudra attendre le dernier chapitre de cette lecture, pour  savoir. Mais le mystère s’épaissit, car le récit diffère à ce douzième chapitre pour David et Samuel. Pourquoi ?
1986. Comme chaque année, David, et son ami Samuel se retrouvent à Saint-Nazaire-de-Ré où leur famille bénéficie des pavillons attribués aux salariés de l’usine où travaillent leurs familles. En effet, l’usine de Paul Vermont nourrit nombre de salariés depuis des générations. De plus, dans un esprit paternaliste, ses pavillons sur la côte mis à disposition des salariés leur garantissait un dépaysement.
Cependant, en 1986, l’heure d’or de la sidérurgie périclite et l’entreprise familiale est à la veille de la faillite. Paul Vermont, décide de cacher cette difficile réalité d’un chômage imminent à l’ensemble des salariés, au moins jusqu’à la fin de l’été.
Et pendant cet été-là, Julie une fillette en vacances à Saint-Nazaire, va se lier d’amitié avec David et Samuel. Ainsi, un trio complice va se former. Pourquoi ce chapitre de leur vie resurgit aujourd’hui à David et Samuel ?

MON AVIS

J. Loubry, déjà chroniqué avec un précédent ouvrage 👉« Les chiens de Détroit », renoue ici avec l’idée d’enfants au cœur de l’histoire, dépeints autour d’une esquisse à connotation sociale. « Le  douzième chapitre » évoque une société ouvrière, où les congés payés sont organisés selon le modèle d’un financement participatif du patronat, en nature avec une mise à disposition de pavillons. Avec une noirceur très édulcorée de ce présent roman le distingue nettement du précédent. Dans une ébauche de la Vendée en toile de fond, l’auteur dilue son intrigue autour des jeux candides d’enfants contrariés par ceux plus cruels et rageurs d’adultes acculés par la vie.

Des chapitres de la vie actuelle de David ponctuent ceux relatifs à l’été 1986, un été d’insouciance inoubliable et pourtant un goût amer est tu depuis toutes ces années. Cette brèche du passé fissure son présent déjà compliqué ouvre alors nombre de questions, et réveille des fantômes enfouis dans la mémoire collective, à quelques exceptions près. Il n’était qu’un enfant, alors pourquoi s’acharner sur lui aujourd’hui ?

DES AMIS DE VACANCES

Les embruns de la plage embaument l’insouciance des vacances de David et Samuel. Alors quand Julie se glisse dans ce duo, elle le perturbe, mais pour du mieux. Gaie, impulsive et franche, sa fraicheur impulse des évènements, des questionnements et bouleverse un peu le rituel des garçons habitués à se retrouver chaque année. Cette petite fille intrigue car elle semble paradoxale : transparente et mystérieuse à la fois. D’un côté protégée par une « chaperonne » attentive à une éducation cadrée, Julie aurait pu se montrer peureuse et craintive. Or, rien de cela. Elle donne le change en enfreignant les règles dès que possible avec audace — d’où leur échappée au « Bois Tordu », ou à faire le mur— . De plus, loin d’être timide, Julie pousse ses camarades de jeux à suivre ses idées parfois transgressives. Ainsi, l’intrépidité des garçons est mise à l’épreuve.

En attendant, en 2017, à la lecture des pages reçues des lustres plus tard, cette complicité de vacances va se rappeler à l’esprit de David et Samuel devenus adultes.

AVANT LA TEMPETE

Mais dans le monde des adulte se développe en parallèle, un climat inhospitalier et une tension palpable. A côtoyer l’antipathie du frère de Samuel et l’hostilité de son beau-père, le malaise de David pointe déjà. S’ajoute à cette ambiance tendue, la recherche dans les environs d’Emilie une petite fille disparue. Est-ce pour cette raison que David est concerné par ces pages ? Car en effet, une tragédie signera la fin de ces vacances enchanteresses.

Quel coup du sort frappe cet endroit, terre de suicide, incendie, disparition où aujourd’hui règne menace, ou crime… David, devra engager un bras de fer avec ses peurs du passé, pour dénouer ce méli-mélo de secrets de l’époque qui hantent son présent… et le temps presse pour sa propre vie et celui de son ménage, où sa femme reste insensible à ses traumas.

Bonne lecture. Un bon dosage d’amitié enfantines sincères face à un pessimisme réaliste des difficultés économiques et sociales procure une intrigue sympathique. Même si d’innocentes victimes en pâtissent, le suspens est présent mais pas angoissant.

Sorti en livre de poche, vous le trouverez chez votre libraire, chez DECITRE ou à la FNAC.