RÉSUMÉ
07/01/2021
415 p.
Copenhague. Sondermarken. Danemark
Gregers Hermansen est hospitalisé à cause d’une crise cardiaque à la suite de la découverte du corps ensanglanté de sa jeune voisine Julie Sander. L’assassin l’a tailladée avec une singulière cruauté. Avant de tuer sa victime, il lui a sculpté le visage à la manière d’un gækkebrev − un découpage traditionnel danois −.
Jeppe Korner et Anette Werner, les enquêteurs dédiés à l’affaire, vont décortiquer la scène de crime et le supplice infligé à la victime. Ils vont éplucher toutes les fréquentations de la jeune fille. La logeuse Ester, une retraitée en passe de devenir auteure de romans policiers, puis le père et l’amie colocataire de Julie seront interrogés.
Et, bientôt la piste la plus probable s’avère Kritoffer, un amoureux éconduit qui a partagé les dernières heures de Julie. Mais la mort du jeune homme change la donne. Alors, Jeppe et Annette creusent encore dans le passé de Julie pour en éclaircir nombre mystères.
Or entretemps, Esther alerte la police de ses découvertes macabres. Cette auteure en herbe a réalisé avec effroi la coïncidence entre le mode opératoire du crime de Julie et celui imaginé dans son roman en cours de rédaction. Est-elle responsable des conséquences ? En quoi est-elle directement, indirectement mêlée à cette mort ? Est-ce une coïncidence ? Qui a pu lire son premier jet, et s’en inspirer pour tuer la jeune fille qu’elle estimait beaucoup ?
MON AVIS
Découverte d’une auteure danoise, excellent surtout pour un premier roman, avec ce service de presse proposé par le site Netgalley et les éditions Fleuve. Le récit se situe au Danemark et pour des raisons logiques, en rapport avec l’enquête, nous nous déplacerons ponctuellement vers les îles Féroé. Ici, ma seule réticence tiendra dans le choix du titre à l’évocation trop énigmatique ou symbolique.
UN POLICIER SCANDINAVE
L’affaire réunit deux policiers aux tempéraments opposés. Jeppe, le vieux briscard expérimenté m’a plus séduite que sa jeune collègue Anette. Or, leur collaboration bien combinée sera fructueuse. L’enquête part dans tous les sens, on se noie dans les suppositions sans jamais s’égarer. Et peu à peu le brouillard se dissipe avec intérêt, car beaucoup de thèmes sont abordés.
Attention : Âmes sensibles s’abstenir, comme dans un précédent ouvrage chroniqué 👉📖 « Concentre-toi et respire » de Vanessa Laferrière. Les détails d’une autopsie s’expose dans toute sa noirceur, et avec réalisme. En effet, les ustensiles manipulés, la couleur des tissus et la procédure permettent de se représenter un laboratoire de la criminelle scientifique.
UN LIVRE AUTOUR D’UN LIVRE
Les paragraphes rédigés dans une police d’écriture distincte insérés çà et là dans le roman déstabilisent un peu au début. Sans divulgâcher, ces parties se révèleront être extraites du livre rédigé par Esther. Le crime et l’enquête qui tournent autour de l’écriture d’un livre rappellent une précédente chronique 👉📖 LE JOURNAL DE CLAIRE CASSIDY d’Elly Griffiths.
Intéressant de constater une méthode répandue : la mise en ligne sur Internet d’écrits d’auteurs inspirés pour recueillir des avis sur leurs plumes. Tout en garantissant l’anonymat pour moins se « mettre à nu », ces communautés virtuelles permettent aux membres d’évaluer leur talent littéraire. Mais cela illustre aussi les risques du viol de confidentialité de la communauté des écrivains.
UNE INTERACTION INTÉRESSANTE DES PERSONNAGES
Leur crédibilité tient au profil bien pesé par l’auteure, tout en nuance. Animés de plusieurs facettes, tous y compris les policiers, sont criants d’authenticité, comme dans la réalité.
À commencer par Julie qui rend à la victimologie (étude de la victime) sa dimension primordiale. L’examen de vécu plus ou moins lointain de la victime, jalonné de complications, laisse planer un mystère autour d’une rencontre énigmatique.
Puis dès le début, apparaît la personnalité singulière du personnage d’Esther. On cerne une carapace au tempérament fort et indépendant qui sait dissimule sa sensibilité, notamment avec ses locataires.
Les nombreux personnages assurent du dynamisme. De plus, toutes leurs ambiguïtés évitent l’écueil d’un manichéisme et procurent un bon suspens.
POUR ALLER PLUS LOIN
gækkebrev
: lettre de Pâques (avec traduction, source Wikipedia)…
Une lettre gecko de tradition danoise spécifique de Pâques contenait à l’origine une perce – neige. D’ailleurs, le nom est associé au verbe «gecko» dans le sens «tromper». Des lettres groupées ont remplacé les lettres obligatoires. Les nœuds des lettres de reliure ont été remplacés par des trombones complexes en forme de nœuds. La coutume était utilisée pour flirter entre jeunes, et un clip de lettre de « fou » typique pourrait être le «nœud d’amour», où le motif de nœud du trombone formait plusieurs cœurs. Le destinataire doit trouver le nom ou les initiales de l’expéditeur de la lettre gecko. S’il n’est pas deviné la première fois, le destinataire doit un œuf de Pâques à l’expéditeur. Autre tradition : pour chaque erreur, le destinataire doit un œuf de Pâques à l’expéditeur.
